L'accord tarifaire suisse révèle les nouvelles règles du commerce de l'ère Trump : Payer pour jouer, puis repayer

Par
Pechschoggi
6 min de lecture

L'accord tarifaire suisse révèle les nouvelles règles du commerce de l'ère Trump : Payer pour avoir accès, puis payer encore

La percée que la diplomatie n'a pas pu obtenir

La Suisse semble sur le point d'échapper à l'un des régimes tarifaires les plus punitifs imposés par les États-Unis, les négociations progressant vers un accord qui réduirait les droits de douane sur les produits suisses de 39 % à 15 % dans un délai de deux semaines. Mais la voie vers cet allégement révèle une vérité inconfortable sur la diplomatie commerciale moderne : parfois, les milliardaires réussissent là où les ambassadeurs échouent.

Le tournant est intervenu la semaine dernière dans le Bureau ovale, où une délégation de titans de l'industrie suisse – et non de ministres du gouvernement – a rencontré directement le président Trump. La séance "s'est si bien passée", selon des sources proches des discussions, que Trump a immédiatement ordonné au Représentant américain au Commerce, Jamieson Greer, d'intensifier les négociations. En quelques jours, une impasse qui perdurait depuis août a commencé à se fissurer.

Le contraste est frappant. Des mois de canaux diplomatiques formels n'avaient produit qu'une escalade, aboutissant au taux de 39 % – le plus élevé appliqué à une économie développée et près de trois fois supérieur aux 15 % prélevés sur l'Union européenne. Pourtant, une seule réunion impliquant les plus riches industriels suisses semble avoir accompli ce que les délégations techniques n'avaient pu faire.

Pourquoi 39 % était toujours économiquement irrationnel

Le tarif punitif imposé en août était basé sur un déficit bilatéral de biens d'environ 40 milliards de dollars, un chiffre considérablement gonflé par le rôle de la Suisse en tant que plaque tournante mondiale du raffinage de l'or. Lorsque les raffineries suisses traitaient de l'or pour le réexporter vers les États-Unis, ces flux apparaissaient comme des exportations suisses dans les statistiques commerciales – créant l'illusion d'optique d'un déséquilibre structurel.

Si l'on retire la distorsion liée à l'or et que l'on tient compte de l'excédent de services de 25 milliards de dollars des États-Unis avec la Suisse – dominé par les services financiers et la recherche pharmaceutique menés par des entreprises suisses dans des installations américaines – alors le "déséquilibre" s'évapore en grande partie. Les fonctionnaires du Représentant américain au Commerce le comprenaient. Le taux de 39 % n'a jamais relevé de la logique économique ; il s'agissait d'obtenir des concessions.

Les dommages immédiats ont été graves et mesurables. Les exportations suisses vers les États-Unis ont chuté de 18 % au troisième trimestre, les ventes de machines diminuant de 25 %. Les prévisions de croissance pour 2026 ont été réduites de 1,4 % à 0,9 %. Le chômage a légèrement augmenté dans les cantons dépendants de la fabrication de précision. Le secteur de l'horlogerie de luxe, incapable de répercuter les coûts sur des produits déjà vendus à des prix élevés, a subi ce que les publications du secteur ont qualifié de choc "sismique".

La réponse de la Suisse fut stratégiquement astucieuse : pas de représailles, pas de plaintes publiques auprès de l'Organisation Mondiale du Commerce, juste une diplomatie discrète et une volonté d'attendre. Cette retenue a permis de maintenir les canaux de négociation ouverts alors même que d'autres nations lançaient des mesures de rétorsion.

Le véritable prix de l'accès au marché

La structure de l'accord en cours révèle ce que la Suisse achète réellement avec ses concessions. L'alignement à 15 % n'est pas un cadeau – c'est le prix à payer pour des engagements qui totaliseront probablement 10 à 15 milliards de dollars en nouveaux investissements directs étrangers américains et des promesses explicites d'accroître l'emploi aux États-Unis.

Cela représente un changement fondamental dans l'architecture commerciale. Les accords traditionnels se concentraient sur les barèmes tarifaires et l'harmonisation réglementaire. Le modèle de l'ère Trump exige des transferts visibles : usines, emplois, engagements d'approvisionnement. La Suisse paie essentiellement des frais d'accès, libellés en capital national qui pourrait autrement financer l'innovation sur son propre territoire.

Le secteur pharmaceutique illustre les vulnérabilités restantes. Alors que les médicaments ont été largement épargnés par le taux de 39 %, un examen distinct de la chaîne d'approvisionnement pharmaceutique, au titre de la section 232 relative à la sécurité nationale, se poursuit. Les exportations pharmaceutiques suisses vers les États-Unis totalisent 50 milliards de dollars par an – plus que les montres, les machines et le chocolat réunis. Un droit de 25 % sur ce secteur, justifié par des préoccupations de "sécurité" de la chaîne d'approvisionnement, annulerait tous les gains du taux général de 15 %.

Le précédent et ses mécontentements

Pour la Suisse, l'accord représente une validation de sa politique commerciale traditionnellement indépendante, menée en dehors du cadre de l'Union européenne malgré l'intégration économique. Cette indépendance se traduit désormais par un bouclier tarifaire dont ne disposent pas les membres de l'UE, qui restent bloqués à 15 % en vertu de leur accord à l'échelle du bloc.

Mais le précédent a des implications multiples. D'autres petites nations riches avec des excédents bilatéraux – Norvège, Singapour, Corée du Sud – sont désormais confrontées à un modèle : si vous voulez accéder au marché, montrez-vous prêts à délocaliser capitaux et emplois sur le sol américain. Le modèle du "payer pour avoir accès" devient explicite plutôt qu'implicite.

Pour les États-Unis, l'image est mitigée. La réduction des tarifs de 39 % à 15 % quelques mois après leur imposition suggère soit que le taux initial n'était jamais défendable, soit que l'accès à de hauts fonctionnaires a une valeur économique substantielle. L'une ou l'autre interprétation sape les affirmations selon lesquelles la politique tarifaire suit une analyse économique rigoureuse plutôt qu'une opportunité politique.

Une fragilité intrinsèque au cadre

Même s'il est finalisé, l'accord comprendra probablement des mécanismes de surveillance et des clauses de réimposition rapide potentielles – un langage permettant aux États-Unis de réimposer des tarifs plus élevés si les flux commerciaux bilatéraux évoluent défavorablement. Cela crée une incertitude persistante que les accords commerciaux conventionnels étaient conçus pour éliminer.

Les négociations s'étaient déjà effondrées une fois, en juillet, lorsqu'un tarif "de référence" inférieur aurait été convenu au niveau technique, avant d'être rejeté personnellement par Trump. Ce schéma – des accords torpillés au dernier moment par la prérogative présidentielle – reste un risque matériel tant que les signatures ne sont pas apposées et que la mise en œuvre ne commence pas.

Le calendrier de deux semaines est plus une aspiration qu'une certitude. Les responsables suisses et américains ont refusé de commenter publiquement, et de précédents accords "imminents" se sont évaporés. Les marchés qui considèrent cela comme acquis sous-estiment le risque d'exécution.

La plus vaste remise en question

L'expérience de la Suisse résume le nouvel environnement commercial : bilatéral, transactionnel et axé sur les personnalités. Les cadres multilatéraux et les systèmes fondés sur des règles reculent. L'accès des entreprises devient une variable politique. Les engagements d'investissement remplacent les réductions tarifaires.

Pour les exportateurs suisses, 15 % représente un salut par rapport à 39 %, mais c'est loin d'être du libre-échange. Pour les consommateurs américains, les recettes douanières perdues et les prix plus élevés des produits suisses représentent une taxe pour financer des emplois manufacturiers visibles – un calcul politique plutôt qu'économique.

Le test ultime ne viendra pas de l'annonce de l'accord, mais de sa durabilité. Un accord construit sur la diplomatie d'entreprise et les promesses d'investissement peut-il survivre aux changements de vents politiques ou aux données du commerce bilatéral ? La Suisse est sur le point de découvrir si elle a acheté l'accès au marché ou si elle l'a simplement loué.

PAS UN CONSEIL EN INVESTISSEMENT

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