
Meta, X et LinkedIn contestent le redressement fiscal italien d'un milliard d'euros sur les données des utilisateurs
Le prix de la gratuité : En Italie, un pari fiscal d'un milliard d'euros contre les géants de la tech
MILAN — Dans les tours rutilantes de la Silicon Valley, le mot « gratuité » a longtemps été la formule magique qui a bâti des empires. Mais dans les salles d'audience marbrées de Milan, les autorités fiscales italiennes ont audacieusement fixé un prix à ce modèle économique : 1,04 milliard d'euros.
Meta Platforms, X (anciennement Twitter) et LinkedIn se retrouvent désormais pris dans ce que les observateurs du marché décrivent comme une bataille juridique décisive qui menace de modifier fondamentalement l'économie des données utilisateur à travers l'Europe. Les entreprises ont déposé des recours juridiques formels contre les exigences fiscales sans précédent de l'Italie, préparant le terrain pour un affrontement qui pourrait redéfinir le mode de fonctionnement des plateformes numériques au sein de l'Union européenne.
La question à un milliard d'euros : Vos données sont-elles un paiement imposable ?
Au cœur du litige réside une interprétation juridique révolutionnaire : selon celle-ci, lorsque les utilisateurs s'inscrivent sur des plateformes sociales « gratuites » en fournissant des données personnelles, ils s'engagent dans une transaction de troc imposable soumise à la taxe sur la valeur ajoutée (TVA).
Les autorités fiscales italiennes ont émis des demandes de 887,6 millions d'euros à Meta, 140 millions d'euros à LinkedIn et 12,5 millions d'euros à X pour des activités menées entre 2015 et 2022, les réclamations immédiates ciblant les années approchant la prescription légale.
« Il ne s'agit pas simplement de récupérer des recettes fiscales, mais d'établir un nouveau paradigme pour évaluer l'économie numérique », note un chercheur en politique fiscale basé à Milan et familier avec la procédure. « Ce que l'Italie tente de faire monétiserait effectivement l'échange d'informations personnelles qui sous-tend pratiquement toutes les grandes plateformes technologiques. »
Les trois géants de la technologie ont uniformément rejeté cette interprétation, préférant le litige au règlement à l'amiable. Leurs documents juridiques soutiennent que l'accès aux plateformes de médias sociaux sans compensation monétaire ne peut raisonnablement constituer un événement imposable dans le cadre des régimes de TVA existants.
Mesure pionnière ou excès juridique ?
Les experts du secteur qualifient l'approche de l'Italie de sans précédent dans sa franchise. Alors que les pays européens ont de plus en plus ciblé les géants de la technologie par le biais de diverses taxes sur les services numériques, aucun n'a classifié aussi explicitement les données utilisateur comme une forme de paiement soumise à la TVA.
« Ce qui rend cette affaire particulièrement significative, c'est que l'Italie a sauté la phase de négociation habituelle et est passée directement à l'évaluation formelle », explique un spécialiste en conformité fiscale internationale qui a requis l'anonymat en raison de ses relations professionnelles avec les parties impliquées. « Cela suggère une confiance extraordinaire dans leur position juridique, malgré d'importants vents contraires. »
Ces vents contraires incluent un avis non contraignant du Comité de la TVA de l'UE en mai, qui a rejeté l'argument central de l'Italie. Six États membres ont soutenu cette position, créant ce que certains analystes juridiques décrivent comme un « climat réglement